Étiquetage sur le devant de l’emballage
À titre d'exemple, plutôt que de viser à informer davantage les consommateurs, la proposition pour l'étiquetage sur le devant de l'emballage fera en sorte d’attirer l’attention sur trois éléments nutritifs ciblés – le sodium, le sucre et les gras saturés – sans tenir compte des bienfaits nutritionnels qu'un produit pourrait avoir et sans faire la distinction entre les aliments riches et pauvres en éléments nutritifs. Les produits ciblés comme étant à teneur « élevée » (contenant plus de 15 % de la valeur quotidienne recommandée) en un de ces trois éléments nutritifs seront classés dans une même catégorie et affublés d'un symbole (par exemple un panneau « arrêt » ou « cédez ») pour dissuader les consommateurs de les acheter, peu importe leur valeur nutritionnelle globale (ou leur absence de valeur nutritionnelle). Au Canada, tous les produits alimentaires doivent afficher un tableau de la valeur nutritive, lequel véhicule considérablement plus d'information qu'un symbole d’avertissement pourrait le faire. Apposer un symbole tel qu’un panneau d'arrêt sur le devant des produits ne donne pas aux consommateurs des renseignements qu'ils ne pourraient pas trouver au dos de l'emballage; cependant, cela pourrait les pousser à éviter ces produits, sans même consulter le tableau de la valeur nutritive.
Par ailleurs, l’approche qui consiste à mettre l’accent sur le sodium, le sucre et les gras saturés pour établir des lignes directrices et recommandations en matière de saine alimentation est peu susceptible de favoriser l’adoption d’une alimentation saine et équilibrée et ne va aucunement dans le sens des données scientifiques actuelles. En effet, les experts s’entendent de plus en plus pour dire qu’il est important de considérer les aliments en entier, et non pas seulement leur teneur en sodium, en sucre et en gras saturés, au moment d’évaluer leur impact sur la santé, puisque d’autres composantes et éléments nutritifs contenus dans ces aliments pourraient avoir des effets bénéfiques et neutralisants. À titre d’exemple, les produits laitiers sont des aliments sains et nutritifs qui, comme le mentionne le récent examen des données probantes de Santé Canada (2015), sont actuellement sous-consommés par la plupart des Canadiens. De plus, ils ne sont pas associés à des effets non favorables sur la santé. Le rapport de l’examen mentionne également que l’apport en huit éléments nutritifs (calcium, magnésium, zinc, vitamine C, vitamine A, vitamine D, potassium et fibres) est inadéquat chez les gens de nombreux groupes d’âge. Or, les produits laitiers fournissent six de ces éléments nutritifs. En fait, les produits laitiers, même ceux qui contiennent des gras saturés de même que du sodium et du sucre ajoutés, ont été associés à des effets neutres ou bénéfiques sur la santé, par exemple sur les maladies cardiovasculaires, le syndrome métabolique, la tension artérielle et le diabète de type 2.
Malheureusement, dans la proposition actuelle, des aliments à teneur élevée en éléments nutritifs comme le fromage (même les versions à teneur réduite en gras), le yogourt aromatisé et le lait entier arboreront un symbole d’avertissement qui pourrait décourager leur consommation, malgré les données scientifiques reconnues qui montrent leurs effets bénéfiques sur la santé. Et comme si ce n'était pas assez, des aliments pauvres en éléments nutritifs tels que les croustilles ou les boissons gazeuses diètes n’arboreraient pas ces étiquettes d’avertissement et pourraient donc être perçus comme plus « sains » que des aliments riches en éléments nutritifs. Cette contradiction vous semble déroutante? Vous n'êtes pas seuls! Nous doutons qu'il s'agissait de l'intention de Santé Canada avec cette politique, mais néanmoins, c'est l'effet qu'elle pourrait avoir si des modifications ne sont pas apportées rapidement.
Il est important de considérer ces politiques collectivement et de regarder la situation dans son ensemble. Le problème ne réside pas dans l'objectif de la Stratégie pour une saine alimentation en tant que telle, mais dans la route proposée – une route qui manque de nuance et qui va parfois à l’encontre de l’objectif.
Ce que vous pouvez faire pour nous aider
Si, comme nous, vous êtes préoccupé par les répercussions que cette politique pourrait avoir sur des aliments nutritifs, nous vous encourageons à :
- Vous inscrire à notre liste de diffusion par courriel afin de recevoir plus d’information;
- Lire Nouvelles laitières, un bulletin qui a été envoyé aux députés pour leur fournir plus de renseignements à ce sujet;
- Faire part de vos préoccupations à votre député ou députée si vous faites sa rencontre dans votre circonscription cet été.
